Pour faire suite à la mention par Jack Marchal du nom de Léon Degrelle, un peu d'exaltation littéraire. Un des plus grands pamphlétaires, des plus grands écrivains français sans doute est belge, et il n'est pas même détesté ou maudit, mais simplement écarté. Pas esthète puisque politique, et pas accessible au jugement esthétique puisque profondément mauvais. – Il conviendrait de préciser qu'il y a le mal mauvais et le mal bon, dit transgressif… Il y aurait beaucoup à dire sur ce que cet exemple montre de l'immoralisme moral de l'époque, mais ce sera pour une autre fois.

Écarté donc. Pourtant il y a du Rousseau et du Joseph de Maistre chez Léon Degrelle, mais il y a aussi du Hitler – ceci devant sans doute, par quelque formidable tour de passe-passe rhétorique, annuler cela. La démocratie qu'il conchiait et qu'aujourd'hui l'on pare des milles vertus de l'évidence – que sont tristes les époques d'évidence ! et qu'elles servent mal ce qu'elles soutiennent… – ne vaut qu'en ce qu'elle pourrait faire entendre au peuple, c'est-à-dire à l'homme en entier, dans sa faiblesse et sa rudesse, cette beauté radicale, autonome mais incarnée, purement esthétique mais tout entière politique, d'un texte immoral, haineux et génial, en un mot d'un texte fou et sans égal dans son ordre.

Mais la démocratie réelle en reste là-dessus aux ravachols du pétard mouillé, et refuse au peuple – qu'elle prétend autonome tant que cela n'implique pas de libertés concrètes – tout ce qui est grand, pour lui opposer ce qui est bon, et qui par malheur, est petit et bien laid. La liberté pour quoi faire, si ce n'est pour faire entendre ce qui est inouï ? La démocratie pour quoi faire, si ce n'est pour donner à tous le sentiment enfin vif, enfin épuré des scories moralisatrices, des prêches, des religions qui s'ignorent, le sentiment tout simple et par lui-même si vrai du sublime ? Quitte à connaître enfin ce qu'on prétend haïr par humanité, au risque humain de l'aimer aussi par côtés.