Carnets de grenier

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Tag - guerre civile

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mardi 18 août 2009

Richard Millet, Le premier mort

Entrée du camp de Chatila, 1982.


La guerre avait changé de nature ; il y avait eu les combats de rue du quartier Kantari, où j'avais appris à courir en tirant et où j'ai enfin tué mon premier ennemi : un type d'environ seize ans, au front ceint d'un bandeau noir, un jeune Mourabit qui avait surgi d'une porte d'entrée dont la beauté m'a sauvé la vie, car si je n'avais pas été tenté d'en admirer la voûte, je n'aurais pas aperçu ce type qui débouchait de sa maison avec l'intention de forcer le passage, sa kalachnikov demeurant muette tandis que, terrifié en même temps que pris d'une fureur que je ne n'avais jamais éprouvée, je lui vidais mon chargeur dans le ventre, sans détacher mes yeux des siens où je voyais une haine qui n'était peut-être qu'une manière de dépit ou une façon d'accompagner sa surprise et une insupportable douleur. Les dernières balles, je les ai tirées avec une joie extraordinaire, un sentiment de délivrance, de pureté, de puissance, et un souci de perfection qui me récompensait d'une si longue attente, me concentrant sur son ventre puis sur sa gorge de sorte que la tête s'est presque détachée du corps, mon sexe se dressant dans mon treillis, non par cruauté ou satisfaction sadique, mais parce que ce garçon me transmettait en quelque sorte sa virilité, la haine et le désespoir que j'avais vus dans son regard ayant d'ailleurs fait place, chez lui aussi, à une espèce de joie, celle sans doute de bientôt gagner le paradis et encore de sentir qu'il me donnait sa vie dans ce qu'elle a de plus évidemment puissant : l'instinct sexuel, enfin libéré, et qui, dès lors, ferait qu'on me regarderait autrement ; les hommes, bien sûr, qui m'accepteraient sans réserve (y compris Iskander qui, de distant et hostile, deviendrait quasi collant et veillerait désormais sur moi comme un grand frère, me reprochant seulement de n'avoir pas rapporté la tête du chien musulman disait-il, pour l'installer sur la calandre de l'Oldsmobile qui nous servait de transport de troupes, et, alors qu'il disait cela, je devinais qu'il en eût été capable : il le montrerait, quelques mois plus tard, à Dékouané), mais aussi les femmes, notamment Denise, qui combattait aux côtés de Roula, et dont le regard qu'elle portait sur moi me rappellerait en permanence l'expression de feu dévorant : or, elle ne me plaisait pas, malgré ses gros seins, et c'était encore Roula que je cherchais dans ce feu, dussé-je m'y consumer, m'y damner, la damnation, en ce cas, consistant à désirer en vain une femme qui est très précisément notre genre et qui, par cela même, sans qu'on sache pourquoi, sinon par une cruauté du sort, ou que nous nous l'interdisons à nous-mêmes, nous reste interdite.

Richard Millet, La Confession négative, Gallimard, « Blanche », 2008, pp. 195–197.





À venir : quelques mots sur cet ouvrage superbe de R. Millet.

lundi 10 août 2009

Libations citoyennes, I : Tout est bien

Je suis un sot, et un bourgeois, il faut bien le confesser : la nuit, tristement, honteusement, j'aime dormir. Esclave d'études à présent terminées et inutiles, d'un travail épisodique et ingrat, je demeure dans mon isolement coupable. Pourtant, il suffit parfois d'un geste pour aller vers l'autre, ou du moins, pour le laisser venir à vous. J'ai passé le pas, enfin : j'ouvre la fenêtre.

Chasseur blanc, coeur noir

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mercredi 5 août 2009

Première fournée de l'hyper abécédaire négatif

Plus d'une quarantaine de liens dûment sélectionnée et ordonnée pour commencer.


« "Formation, éducation, culture, aménagement du territoire, émancipation, protection, développement durable, agriculture, forums participatifs, maternité, imaginer Poitou-Charentes autrement, imaginer la France autrement, imaginer autrement autrement."
Apprenez cela par cœur, je vous en prie, vous gagnerez du temps. […] Quant à la part maudite, elle aura le droit de s’exprimer, bien sûr, mais seulement aux heures de récréation. »
— Ph. Muray, Le Sourire à visage humain, Les Belles Lettres.




On ne passe pas


Avertissement : La page qui suit est destinée à être actualisée périodiquement, par ajout de nouveautés ou de vieilleries ayant échappées à ma vigilance citoyenne. Certains textes de mon goût sont aussi devenus totalement introuvables et feront peut-être l'objet d'un hébergement autonome, si j'ai le temps de m'occuper de cela. Libre à vous de me proposer d'autres chose qui vous paraissent fondamentale, et oubliées.

  • A

A comme adieu : Bref extrait de l'ouvrage du Général Bigeard, Adieu ma France, paru aux éditions du Rocher, sur le site de François Desouche.

A comme anti-fascisme : Texte tiré de l'émission Répliques d'A. Finkielkraut, diffusée le 29 septembre 2007 sur France Culture, dans lequel Lionel Jospin fait un sort à l'anti-fascisme d'origine mitterrandienne, repris sur François Desouche.

A comme antiphrase : Réjouissante lettre ouverte de feu Serge de Beketch au président du MRAP, « Punissons tous les racistes », sur Bien dégagé derrière les oreilles.

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